Umberto Eco, universitaire et romancier italien (auteur du roman Le Nom de la rose) se pose la question, dans un article publié dans L’Espresso, de savoir quand et s’il faut faire confiance à Wikipédia.
Marié sur Wikipédia ?
Dans cet article, Umberto Eco revient sur ce qui fait la force de Wikipédia, le travail collaboratif et le fait que des milliers d’yeux sont braqués sur les pages de l’encyclopédie, prêts à supprimer les erreurs introduites par des contributeurs mal intentionnés ou tout simplement ne disposant pas d’informations à jour ou vérifiables.
Il y aborde aussi les possibles dysfonctionnements du système, notamment le fait que là où le processus communautaire est pratiquement sans faille sur des articles à haut trafic et à grande visibilité, il l’est sans doute moins sur des articles plus confidentiels.
Son analyse se nourrit d’exemples qui le touchent de près, puisqu’il s’est trouvé (de façon erronée) marié à la fille d’un couple de ses amis par la lubie de quelque auteur en mal de fantasmes, qui a inséré cette information dans son article sur la Wikipédia italienne. Il avait auparavant relevé quelques erreurs dans son article, telle l’affirmation qu’il était l’aîné de treize enfants, alors que c’était son père qui l’était.
C’est d’ailleurs pour éviter ce genre d’erreurs que les projets Wikimédia se posent la question d’introduire ou non les « flagged revisions » comme outil de protection des articles.
Il faut croiser l’information, toujours et encore
Ces déboires, bien réels, n’empêchent pas Umberto Eco de faire confiance à Wikipédia… comme devrait le faire tout un chacun, sous certaines conditions. En tant que chercheur, M. Eco est habitué à croiser ses sources, plusieurs fois si possible, afin de bien saisir les tenants et les aboutissants du sujet qui l’intéresse. Il fait de même avec Wikipédia et donne même quelques astuces pour bien utiliser l’encyclopédie en ligne.
Tout d’abord, toujours chercher ailleurs pour voir dans quelle mesure une information est reprise par des sources indépendantes. Que ce soit dans un magazine, une bibliothèque ou d’autres sites Internet, il importe de pouvoir trouver l’information ailleurs. Cette démarche est cependant vraie pour toute information que l’on souhaite utiliser, qu’elle soit dans Wikipédia ou sur un quelconque autre site web. Ensuite il propose une idée propre à Wikipédia, celle de chercher à comparer les articles sur un même sujet dans les Wikipédia en d’autres langues. Parfois, l’éclairage donné sur un sujet varie selon la culture et la langue. Pour peu que vous parliez espagnol, chinois ou anglais, suivre les liens vers le même article dans d’autres langues peut vous aider à voir les choses de façon différente.
Umberto Eco reconnaît que ces façons de faire, qui sont (ou devraient être) des automatismes chez un universitaire, ne sont pas forcément les premières choses qui viennent à l’esprit des lecteurs quotidiens de Wikipédia. Lui préconise la mise en place d’un « conseil de la surveillance d’Internet » qui aurait pour mission de surveiller des pages par thème. Cependant, il se rend à l’évidence, surveiller 2 millions de pages retournées par Google sur une recherche sur Napoléon, voire même 552 000 sur un auteur italien moins connu, cela relève de l’utopie.
Alors, quelles solutions ? La question est laissée ouverte par Monsieur Eco, qui se rend compte à quel point trouver la réponse est difficile.
Mon avis est que c’est exactement là une partie de la mission de Wikimédia. Outre assurer l’accès libre à la connaissance libre, nous nous efforçons de développer et diffuser auprès des acteurs de l’éducation notamment, mais aussi du grand public, des outils et de l’information qui permettent de comprendre comment fonctionne un site comme Wikipédia.
N.B. L’article de L’Espresso est en italien, pour une traduction voir Google translate.